Je crois que La Porte est ma première vraie histoire. Pas la première écrite, mais la première imaginée avec ce drôle de mélange de curiosité et d’intuition qui, ensuite, ne vous quitte plus jamais. C’était en décembre 1987. J’étais encore chez mes parents, j’avais dix-sept ans, et je lisais beaucoup. Bob Morane, entre autres. J’adorais la manière qu’avait Henri Vernes de rendre un décor vivant, presque palpable. Je me suis demandé si moi aussi, je pouvais essayer. Juste pour voir. Chaque matin, sur le chemin de l’école, il y avait cette rue. Un endroit étrange, figé entre deux époques. Autrefois prestigieuse, elle n’était plus qu’un décor fané, peuplé de maisons bourgeoises fatiguées, aux volets clos, aux jardins silencieux. Un jour, j’ai décidé d’en décrire une. Rien de plus. Ce n’était qu’un exercice. Mais, sans que je le sache, quelque chose était lancé. La nouvelle en elle-même n’a jamais vu le jour à ce moment-là. J’ai pris quelques notes, que j’ai fini par oublier. Elles sont restées dans un tiroir pendant plus de dix ans.
Puis un jour de 1998, en triant de vieux papiers, je les ai retrouvées. Allez savoir pourquoi, au lieu de les jeter, je les ai tapées sur mon ordinateur et sauvegardées, telles quelles. Et le temps a encore passé.
En 2005, une envie d’écrire m’a repris. Je suis revenu à cette vieille idée, à cette maison que j’avais décrite presque sans le savoir. Elle est devenue le cœur de l’histoire. L’idée d’une fin un peu fantastique s’est imposée. Je l’ai racontée à quelques amis. Leur réaction m’a touché. Je me suis dit qu’il y avait peut-être quelque chose à faire. Et puis Haranis est arrivé.
Le projet des Chroniques d’Haranis a démarré en 2010, sans que je mesure encore combien il allait prendre de place dans ma vie. Quinze ans plus tard, alors que je préparais la sortie du premier tome pour décembre 2026, l’évidence s’est imposée : cette maison, cette nouvelle, La Porte, devait en faire partie. Elle en serait l’un des préludes. Un battement de cœur avant la grande aventure. Le texte a été entièrement réécrit, bien sûr. Mais l’idée de départ est restée fidèle à celle de ce garçon de dix-sept ans qui, un jour d’hiver, s’est demandé s’il pouvait lui aussi écrire quelque chose de vrai.
J’espère que cette nouvelle saura vous toucher autant que j’ai aimé la faire grandir avec moi, au fil du temps.
— Nicky Marc
